J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne (Par le Ministre Gassama Diaby )

    Nous la chantons sans l’avoir connue,
    Nous l’appelons sans jamais la désirer,
    Je l’ai rêvée, aux confluents de nos existences traumatiques,
    Je l’ai rêvée au carrefour de nos angoisses et de nos frustrations multiples,
    Je l’ai rêvée au crépuscule de nos haines recuites,
    Je l’ai bien rêvée, triste de sa maltraitance,
    Je l’ai rêvée, désespérée de son abandon,
    La Nation Guinéenne, faussement implorée, elle nous échappe au creux de nos mains moites de lâchetés partagées,
    La nation Guinéenne, je l’ai rêvée, au triste visage de ne pas advenir,
    La nation Guinéenne, pâle, flétrie, fanée, balafrée de mille blessures se terre de sa triste léthargie,
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne,
    Au lever du soleil, elle s’enfouissait dans son tombeau de malheurs par peur d’être trahie, comme toujours,
    Apeurée qu’elle est de trop de trahisons de ceux et celles qu’elle rêve de servir tant, d’unir et d’épanouir,
    Blessée qu’elle est de ne jamais avoir été intensément désirée, adoptée
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne,
    En fuite, au delà des collines de nos contrées lointaines,
    Chantant des tristes mélodies d’une espérance blessée, d’un rêve trahi,
    Elle est génie politique, on l’a travestie en démon existentiel,
    Elle est création politique, on l’a dépeinte en données absolues et naturelles,
    Elle souhaitait l’égalité pour tous on l’a faite témoin des inégalités offensantes,
    Elle portait en elle les délices d’une juste société,on l’accabla des fardeaux d’une injustice insupportable,
    Elle dégageait les doux parfums d’une fraternité réjouissante, on l’habilla des haillons d’une inimitié accablante,
    Elle sentait les effluves merveilleux d’une solidarité à toute épreuve, on l’éclaboussa des gras souillés d’un égoïsme suicidaire,
    Elle promettait la dignité elle est devenue le lâche réceptacle d’une indignité organisée et misérablement portée,
    Elle chantait la liberté pour tous, on fredonnait pernicieusement l’aliénation pour tous,
    Elle garantissait les vertus de la tolérance, on érigeait les murs de l’intolérance,
    Elle prônait l’humanité, on entretenait vicieusement l’inhumanité,
    Elle devait être l’effort, elle est devenue mendiante et fainéante,
    Elle promettait la confiance, on préféra la méfiance et la défiance,
    Elle était amour on la déguisa en haines et hostilités
    Elle était partage, la voilà rapace et vorace,
    Elle était sincérité, l’hypocrisie l’étouffa,
    Elle était courage, la lâcheté l’étrangla,
    Elle était porteuse d’autorité, la complaisance devint son compagnon de désastre,
    Elle était la promesse de l’unité, elle devint la hantise de la fragmentation et de la division,
    Elle était la promesse d’une démocratie républicaine garantie, elle devint le cauchemar d’un communautarisme identitaire, exclusif et violent,
    Elle était la promesse de la même Loi pour tous, elle est devenue porteuse des normes aléatoires et hypothétiques,
    Elle était la promesse de l’autorité légitime et protectrice, elle est devenue le cimetière de nos renoncements coupables,
    Elle était la promesse du pardon, les rancœurs opportunément entretenues,l’étouffèrent,
    Elle était l’impératif d’une administration neutre, rationnelle et efficace, elle devint l’obligation démagogique d’une politisation hystérique,
    Elle était la promesse d’une confrontation démocratique des idées et des projets, elle devint le cauchemar d’une opposition stupide des identités et des intérêts illégitimes,
    Elle était la promesse du savoir comme condition démocratique, on l’habilla d’ignorance,
    Elle était la promesse de l’intelligence, elle devint le refuge de l’inintelligible,
    Elle était la promesse d’une citoyenneté responsable, elle est devenue une fabrique d’individus aliénés, irresponsables et pathologiquement ethnocentriques,
    Elle commande vérité comme essence de sa survie, on l’abreuve de mensonges pathologiques.
    Elle promettait une jeunesse garant de sa survie heureuse, on l’assomma d’une jeunesse instrumentalisée et manipulable à souhait et à dessein,
    Elle prophétisait la citoyenneté, la voilà transformée en cauchemar ethnique,
    Elle se voulait fraternelle , elle devint compulsivement guéguerre, mesquine et méchante,
    Elle promettait la belle République, les obsessions identitaires lui creusèrent les regards enflammés d’humanité,
    Elle est dialogue, on le fait monologue,
    Elle est paix, on l’assommera de violences stupides et autodestructrices,
    Elle exige le peuple souverain, on empêche ce peuple d’advenir, réduit qu’il est chichement à des communautés de champs de ruine des libertés saccagées,
    Le cœur était sa dynamique, le cynisme ne cessa de frapper à sa porte,
    Elle sollicite des précurseurs, lorsqu’ils pointent le nez, on les accable, on les détruit, jaloux et égoïstes que nous sommes de nos conforts fragiles et de nos obsessions inconfortables.
    Elle se dit fatiguée d’être dénaturée au gré des aléas et des circonstances opportunistes.
    Elle s’est détournée de nous, comme une promesse trahie,
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne,
    Triste de sa triste apathie, ses yeux pissaient les triste ombres de toutes ses filles et fils qu’elle
    aurait tant aimé servir, protéger et choyer de sa belle énergie,
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne,
    Excédée de voir se suivre et se succéder de futiles batailles aux lendemains incertains, elle me fit porter un message limpide.
    » Oh Toi homme désespéré, dit à tes concitoyens qu’aucune bataille ne voudra plus la peine d’être menée que celle de ma reconquête, de ma défense et de la Défense de mes valeurs.
    Moi Nation, je suis l’espérance, votre espérance, je suis l’avenir, votre avenir, me lance t-elle d’une voix exaspérée.
    Sans moi l’illusion sera votre certitude, le vide votre triste et sidérant sort… »
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne,
    Qui fuyait une terre hostile qui lui était pourtant si fièrement promise.
    De hâtes pas, elle me disait, d’une voix tremblante et sombre, vous m’avez trahi, vous m’avez trahi,
    Je vous quitte, tristement, je vous quitte,
    Quand vous serez prêt (e)s à préférer :
    La démocratie aux tentations totalitaires,
    La Loi à l’arbitraire
    La justice à l’injustice
    La vérité au mensonge
    Le pardon à la vengeance
    La liberté à l’aliénation
    L’ouverture à l’impasse
    L’honnêteté à la malhonnêteté
    La dignité à l’indignité.
    La citoyenneté au tribalisme
    La République à la communauté ethnique.
    Le mérite de l’effort à la triste complaisance oisive
    La tolérance à l’intolérance
    L’égalité à l’inégalité
    La paix à la violence
    Le savoir à l’ignorance
    Le travail à la mendicité
    La confiance à la méfiance
    La grandeur à l’avilissement
    Le respect au mépris
    L’humain à la chose
    Je reviendrais alors splendidement de ma triste atonie, porteuse d’une divine espérance pour vous.
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne digne et démocratique, empêchée d’éclore, du fait de nos lâchetés et de nos irresponsabilités respectives,
    J’ai rêvé d’une belle Nation aux blessures profondes quittant une terre qu’elle croyait pourtant faite pour elle,
    Enjambant nos insouciances coupables, elle courait vers des cieux inconnus dans l’espoir qu’elle sera rappelée par ceux auxquels elle se croit toujours pourtant destinée,
    Reviens Belle Nation lui disais-je dans mon rêve, apeuré d’un horizon sans liberté, nous avons compris, nous te servirons fidèlement et loyalement, nous panserons tes injustes plaies, essuierons tes larmes pour que tu sois encore plus belle et prometteuse de liberté, de justice et de paix,
    Que de paroles, Que de paroles, j’en ai assez des balivernes, maintenant je veux des preuves concrètes, me rétorque t-elle l’air furieuse
    Désirez moi d’abord intensément, faites moi vivre dans vos cœurs, dans vos âmes, dans vos actes.
    Je serais meilleur juge de votre sincérité quant à votre envie et votre capacité à répondre de mes exigences, me lance t-elle, impétueuse comme une éternelle cocue…
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne qui me disait au revoir….peut être à Dieu….
    Elle a foutu le camp, la belle Nation, le visage balafré de nos impuissances politiques et de notre corruption morale généralisée,
    La promesse du meilleur deviendra-t-elle définitivement la garantie du pire…
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne, grande dans l’âme, mais triste d’être constamment trahie, et pressée d’être désirable, réconfortée, défendue et protégée, elle et les valeurs qu’elle incarne,
    J’ai rêvé d’une Nation Guinéenne, elle nous tend la main, à nous de la prendre ou pas,
    Je rêvais d’une Nation Guinéenne,
    Quel triste réveil d’un rêve si triste pour une Nation si tristement abandonnée à sa triste infortune.
    Au réveil, le visage défait, le cœur en lambeaux, les pieds tremblants, une âme enveloppée dans un voile de fine tristesse, je la croisa à ma porte la belle Nation, essoufflée elle me sourit avec une gaieté inquiétante mais franche, et me lança d’une voix compassionnelle :
    » Homme désespéré, ne soit pas triste, je ne peux abandonner ce peuple, c’est le mien, vaille que vaille, je serai sa destinée heureuse.
    Elle finira bien par s’en rendre compte…je l’espère et agir conséquemment je l’espère…, je garde espoir…encore, je reste avec vous ».
    J’ai vu une belle Nation qui nous ouvrait son cœur et nous tendait ses bras.
    Maintenant à chacun son examen de conscience pour ce qu’il fait ou ne fait pas pour qu’advienne enfin cette belle Nation, notre unique et véritable espérance….
    M. Khalifa Gassama Diaby
    Ministre de l’Unité Nationale et de la Citoyenneté