Le procès du milliardaire Beny Steinmetz s’est ouvert lundi 11janvier 2021 ,devant le Tribunal correctionnel de Genève. Le Franco-Israélien de 64 ans, qui a fait fortune dans l’industrie minière, est accusé de corruption et de faux dans les titres.
Deux partenaires d’affaires, une Belge de 50 ans et un Français de 58 ans, sont poursuivis pour les mêmes chefs d’accusation. La procédure a pour toile de fond un des plus importants gisements de minerai de fer au monde en République de Guinée, pour lequel 10 millions de dollars de pots-de-vin auraient été versés entre 2006 et 2012 à l’épouse du président Conté. Les trois prévenus rejettent les accusations.
La procédure compte plus de quatre millions de pièces portant sur des sociétés-écrans, des transactions fictives et des prestations fantômes visant à brouiller les pistes, selon l’acte d’accusation. Les prévenus sont assistés de plusieurs avocats. La République de Guinée, qui a retiré sa plainte en 2019, n’est pas représentée à ce procès, suivi par de nombreux journalistes. La salle a été aménagée afin d’assurer le respect des prescriptions sanitaires.
Une instruction « partisane »
En ouverture, les avocats de la défense ont critiqué la manière « partisane » dont le procureur Claudio Mascotto a instruit le dossier pendant sept ans, avec de multiples échanges informels. Le procureur ayant changé de juridiction, le Ministère public est désormais représenté par Yves Bertossa et Caroline Babel Casutt. « Cette absence rend les débats impossibles », a relevé Marc Bonnant, avocat de M. Steinmetz.
Le Tribunal correctionnel a rejeté la demande d’entendre M. Mascotto dans le cadre du procès, considérant que le procureur s’est déjà expliqué sur ses voyages. Il a aussi rejeté les autres demandes, notamment celles visant à écarter les déclarations de Mamadie Touré, l’épouse du président Condé qui vit désormais aux Etats-Unis, et d’Ofer Kerzner, un partenaire d’affaires israélien de M. Steinmetz.
Pour la défense, ces deux témoins-clés auraient dû également être mis en prévention, la première pour avoir accepté les dessous-de-table, le second pour avoir créé de fausses pièces. Or tous deux bénéficient de la clémence de la justice de leur pays en échange de leurs aveux. La Cour tiendra compte de ces circonstances dans l’appréciation des preuves.
« Manque de curiosité »
L’après-midi a été consacré à l’audition de la femme d’affaires belge qui a travaillé pour Beny Steinmetz et ses sociétés à Genève entre 1999 et 2016. Selon l’acte d’accusation, elle a assuré la création, la fourniture, la domiciliation et l’administration de la plupart des sociétés utilisées dans le projet minier en République de Guinée.
D’une voix douce et calme, l’accusée a répondu aux questions de la présidente du tribunal sur les liens entre ces sociétés, les raisons de leur création, les bénéficiaires de bonus, des restructurations et d’autres transactions. Si sa mémoire est parfois défaillante, elle admet avoir signé des documents sans disposer de toutes les informations sur la finalité des opérations et leur légalité.
« Beny Steinmetz Group Resources (BSGR) était une petite équipe en qui je faisais entièrement confiance. Avec le recul, je me rends compte que j’aurais dû poser plus de questions », a-t-elle déclaré, admettant son « manque de curiosité » sur certains points. Par ailleurs, BSGR est impliqué dans tellement de projets qu’il est impossible de tous les connaître, selon elle.
Le procès, qui doit durer toute la semaine, se poursuit mardi avec l’interrogatoire des deux autres prévenus. Des témoins seront appelés à la barre mercredi.