Indépendant depuis 63 ans et sous le joug d’une dynastie kleptocrate depuis 1967, le Gabon vient d’entrer dans une nouvelle ère de turbulences. L’histoire du Gabon indépendant en quinze dates-clés.
17 août 1960 : Indépendance
Le Gabon est la huitième colonie africaine à accéder à l’indépendance. Les débuts officiels de la colonisation française datent de la signature d’une convention entre l’amiral français Édouard Bouët-Willaumez et un chef local, autorisant la création d’un premier poste de commerce sur l’estuaire du fleuve Como. Libreville, la future capitale de la colonie, est fondée en 1849 et la nomination du premier gouverneur français date de 1886. L’exploitation coloniale du territoire gabonais commence après la Seconde Guerre mondiale avec la création et l’implantation de grandes compagnies concessionnaires françaises chargées de mettre en valeur les ressources forestières et minières du pays.
Confronté à la montée de la résistance contre l’exploitation coloniale à travers l’Afrique française, Paris fait voter en 1958 le projet de Communauté franco-africaine accordant une grande marge de manœuvre aux élus locaux. Or la Communauté s’avère très vite un projet éphémère avec la plupart des États membres décidant de prendre leur indépendance. L’indépendance du Gabon est proclamée par Léon Mba, leader du Bloc démocratique gabonais, désigné Premier ministre. En 1961, Mba se fait nommer président, en faisant adopter par le Parlement une nouvelle Constitution supprimant le régime parlementaire.
17 février 1964 : Une première tentative de coup d’État
Dans la nuit du 17 au 18 février, les militaires gabonais renversent Mba, sous l’instigation de son rival, l’opposant Jean-Hilaire Aubame. Fidèle allié de Libreville, Paris dépêche immédiatement ses parachutistes qui mettent fin au coup de force et réinstallent au pouvoir le président déchu.
28 novembre 1967 : Fin du multipartisme
Secoué par le coup d’État et miné par la maladie, Léon Mba meurt dans un hôpital à Paris. Conformément aux dispositions de la Constitution gabonaise, son vice-président Albert-Bernard Bongo est nommé président. L’un des premiers actes politiques du nouveau président est de supprimer le multipartisme et d’abolir toutes les libertés démocratiques. Il impose le Parti démocratique gabonais (PDG) comme parti unique et dirigera le pays d’une main de fer.
25 février 1973 : Plébiscite
Candidat unique à la présidentielle, Albert Bongo est plébiscité avec 99,8% de suffrages. Il remporte également les élections de 1979 et 1986. L’homme s’est entretemps converti à l’islam et se fait appeler depuis 1973 El Hadj Omar Bongo.
10 juin 1975 : Manne pétrolière
Fort de sa manne pétrolière, le Gabon fait partie depuis 1975 de l’Organisation des pays producteurs et exportateurs de pétrole (OPEP). Les relations de Libreville avec l’OPEP s’avéreront tumultueuses. Le plus petit pays du groupe, il quitte l’organisation en 1995 en raison du rejet de sa demande d’une baisse de ses frais d’adhésion pour refléter son niveau de production modeste. Le Gabon rejoint l’OPEP en 1995 dans le but de participer aux négociations multilatérales en cours à l’époque pour augmenter les prix du baril à l’échelle mondiale.
23 mars 1990 : Conférence nationale
De janvier à avril 1990, le Gabon connaît de graves troubles sociaux et économiques. Des émeutes éclatent à travers le pays. Le climat insurrectionnel débouche sur l’ouverture d’une conférence nationale qui s’achève le 19 avril. Les délégués à la conférence optent à l’unanimité pour la restauration du multipartisme.
5 décembre 1993 : Retour au multipartisme
Les Gabonais participent à la première élection présidentielle pluraliste, mais elle est remportée par Omar Bongo, qui va rempiler en 1998 et 2005, face à une opposition divisée.
8 juin 2009 : Disparition d’Omar Bongo
Décès d’Omar Bongo dans une clinique privée à Barcelone, en Espagne.
16 juin 2009 : Les funérailles
Les liens du défunt étaient étroits avec la France. On lui attribuait, avec l’Ivoirien Houphouët-Boigny, la paternité de la fameuse « Françafrique ». Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy assistent aux funérailles qui ont lieu le 16 juin, à Franceville (sud-est du Gabon). C’est la présidente du Sénat, Rose Francine Rogombé, qui assure l’intérim du chef d’État et organise une élection présidentielle anticipée à laquelle elle n’est pas candidate.
30 août 2009 : Présidentielle anticipée
Ali Bongo Ondimba, fils d’Omar Bongo, est désigné candidat par le PDG (parti au pouvoir) pour l’élection présidentielle. Sa candidature est soutenue par les barons du régime et la France afin d’assurer la stabilité du pays. Ali Bongo est élu président de la République avec 41,73% des voix. Il succède à son père resté 41 ans au pouvoir. Mais son élection est contestée par l’opposition. Port-Gentil est secoué par des violences post-électorales et pillages, faisant plusieurs morts. Tout au long de son mandat, la légitimité de ce « fils de » est régulièrement mise en cause, notamment pendant la crise économique que connaît le pays à partir de 2014-2015, à la suite de l’effondrement des cours du pétrole. Les manifestants descendent dans les rues de la capitale, réclamant le départ d’Ali Bongo.
27 août 2016 : Réélection d’Ali Bongo
Les contestations en illégitimité refont surface lorsque Ali Bongo est réélu avec la plus petite marge de voix en 2016. Son challenger Jean Ping allègue des fraudes, allégations qui sont d’ailleurs soutenues par la société civile. L’annonce de la réélection du président sortant provoque des violences inédites au Gabon, avec des manifestations réprimées dans le sang et l’Assemblée nationale incendiée. Les troubles font des morts, une trentaine selon l’opposition. Déclaré toutefois vainqueur par la Cour constitutionnelle, Ali Bongo prête serment en septembre pour un second septennat.
24 octobre 2018 : La maladie d’Ali Bongo
Le président Bongo est victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC) lors d’un déplacement en Arabie saoudite pour une conférence sur l’investissement. Après une hospitalisation de plus d’un mois à Riyad, il est transféré au Maroc, il reste absent du pays pendant au total dix longs mois. Les Gabonais se demandent si leur président est encore apte à gouverner.
7 janvier 2019 : Nouvelle tentative de coup d’État
Selon les analystes, c’est la frustration suscitée par le manque d’information dans le pays sur la maladie du président, qui serait l’un des éléments déclencheurs de la tentative de coup d’État. L’insurrection, conduite par une unité de soldats mutinés, échoue. Les mutins sont arrêtés ou tués.
26 août 2023 : Troisième mandat
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Un mandat de trop ? Bien que toujours souffrant de séquelles de son AVC de 2018, Ali Bongo brigue un troisième mandat, après avoir fait voter par le Parlement une révision de la Constitution réduisant le mandat présidentiel de sept à cinq ans et faisant repasser le scrutin à un tour unique. Il est confronté cette fois à 18 prétendants, dont l’ancien ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Albert Ondo Ossa, candidat consensuel bien que tardif des principaux partis d’opposition.
30 août 2023 : Fin de la dynastie Bongo
Ali Bongo, le chef d’État de 64 ans, qui venait d’être proclamé vainqueur de la présidentielle du 26 août et réélu pour un troisième mandat avec 64,27% des voix selon les résultats officiels, est renversé par un coup d’État. Dans une déclaration à la télévision, un groupe d’une douzaine de militaires annoncent avoir pris le pouvoir au Gabon. Ils déclarent par ailleurs avoir mis « fin au régime en place » et annulé les résultats « tronqués » de la présidentielle qui vient d’avoir lieu. Ainsi finit la dynastie Bongo, au terme de 55 années de pouvoir sans partage