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Immersion] De Ndiayendiaye au palais : L’histoire jamais racontée de Bassirou Diomaye Faye

Bassirou Diomaye Diakhar Faye se prépare à la cérémonie d’investiture ce mardi 2 avril, date de la fin du mandat du président sortant Macky Sall. Le nouveau chef de l’État (44 ans) est originaire de Ndiaganiao, commune rurale située dans le département de Mbour (région de Thiès). Ce petit paysan devenu le plus jeune Président de la République du Sénégal incarne l’ascension éclair d’un homme qui porte le projet d’un parti qui promet un changement radical sous l’impulsion d’un mentor charismatique.

Pour son 44e anniversaire, il ne pouvait pas rêver mieux qu’une élection à la magistrature suprême de son pays, le 24 mars dernier, veille de sa date de naissance. Pourtant il y a un an, ni lui, ni personne d’autre d’ailleurs ne le voyait Président de la République du Sénégal. Bassirou Diomaye Diakhar, jeune Inspecteur des Impôts et des Domaines, qui a flirté avec le monde syndical et le milieu associatif, a maintenant la lourde charge de mener à bien les destinées du pays.

Au lendemain du scrutin qui l’a porté à la tête de l’Etat, c’est un homme au regard fouineur, à la barbe taillée en U, la voix enfantine avec un accent sérère, qui s’est adressé à la population sénégalaise. Mais ce jeune, à l’air un peu gauche, est en effet un crack qui a fait de brillantes études, et un parcours professionnel irréprochable aux impôts et domaines. Et derrière son visage bon enfant se cache un personnage au caractère bien trempé, méthodique et rigoureux. Certains le définissent comme un homme carré dans sa logique, d’autres le qualifient même de sévère.

Pour en savoir plus sur ce quadragénaire issu du milieu rural, nous nous sommes rendus dans son fief natal de Ndiayendiaye, village de la commune de Ndiaganiao à la rencontre de ses parents et proches qui l’ont vu naître et de ses amis d’enfance avec qui il a grandi. Enfant réputé calme, Bassirou Diomaye Faye, qui passait inaperçu dans la masse, a pourtant paradoxalement marqué les esprits dans son entourage.

Diomaye Diakhar, nom qui renvoie à l’honneur et à la dignité

Petit-fils d’un ancien combattant, Ndiouma Cor Faye, le nouveau Président de la République est décrit comme un homme d’honneur et de dignité. Des qualités qu’il a sans doute héritées de sa lignée, car selon la tradition sérère, la signification même des noms Diomaye et Diakhar illustrent bien Bassirou.

Son oncle paternel et homonyme explique: ‘’Je suis le petit frère de son père. La partie Diomaye Diakhar m’appartient et Bassirou à un ami à son papa. Diomaye veut dire en sérère celui qui ne doit pas faire du mauvais. Et Diakhar veut signifie : celui que rien ne peut empêcher de faire ce qui est bien pour les gens. Je pense qu’il illustre parfaitement son nom. Depuis qu’il est aux Impôts et Domaines, personne ne peut dire qu’il a pris un centime qui ne l’appartient pas. Quand on l’a envoyé en prison, il a refusé le bracelet électronique pour rester en prison.’’

Dans son fief, les témoignages sont unanimes. Diomaye a toujours été un jeune respectueux. Un enfant effacé qui n’avait pas beaucoup de fréquentations. ‘’Bassirou était un enfant très calme. Il ne faisait pas beaucoup de bruit. On ne l’entendait pas dans certaines histoires de gamins. Les rares fois que je le voyais sortir, c’est quand j’organisais des tournois de football pour sa génération. C’était un enfant très respectueux. Quand tu le voyais avec ses grands frères, tu pensais même que c’est lui l’ainé’’, témoigne Ousmane Sène, chef de village de Ndiayendiaye.

Malgré son attitude réservée, il a toujours eu le virus de la révolte dans le sang. L’enfant de Ndiaganiao n’a jamais aimé l’injustice et a toujours été prêt à en découdre pour défendre ses libertés. Son grand frère Abdoul Aziz Faye se souvient: ‘’On a toujours eu des relations heurtées, parce que c’est quelqu’un qui a toujours détesté l’injustice. Même quand tu es plus fort que lui, il ne se laisse pas faire. Mais Bassirou, c’est vraiment le genre de frère que tout le monde veut avoir.’’

Brillant élève toujours à la quête du savoir

A Ndiaganiao, le jeune Diomaye, était le moins célèbre des petit-fils de Ndiouma Cor Faye, ancien combattant réputé. Au moment où les gamins de son âge fréquentaient les lieux de loisir pour passer de bon moments entre amis, lui restait à la maison, ou à l’école pour faire ses exercices.

’’On s’est connu au collège en classe de 6e. On s’est rapprochés un jour et il m’a demandé de l’aider en mathématique. J’étais bon dans les matières scientifiques, lui, il était excellent en français.  Je lui ai dit: ‘’quand je t’aide pour les maths, tu vas m’apprendre les matières littéraires notamment la dictée.’’ C’est comme ça qu’on s’est connu. Depuis lors, on ne s’est jamais séparé. En réalité toutes ses connaissances, à l’origine, il les a tissées par la quête du savoir’’, se souvient Mor Sarr, son ami d’enfance.

Des propos corroborés par son demi-frère, Pape NDiouma Cor Faye. ‘’Bassirou était un brillant élève qui respectait ses études. Pour lui, les études primaient sur tout. La preuve, il était tout le temps parmi les trois premiers de sa classe’’, confie-t-il. ‘’C’est quelqu’un qui prenait très au sérieux ses études. Si ce n’était pas en période de vacances, on ne le voyait pas traîner comme les autres enfants du village’’, ajoute Ousmane Sène, chef de village de Ndiayendiaye.

Proche de sa maman

Les études n’étaient pas les seules choses qui poussaient Diomaye à s’éloigner de ses amis sur les terrains de jeu. En effet, Bassirou était très proche de sa mère qu’il aidait dans les tâches ménagères.   ‘’Je connaissais tous ses frères parce qu’on fréquentait certains endroits du village pour jouer aux billes ou au football. Lui, c’est seulement au collège que je l’ai connu. Quand on a discuté, j’ai su qu’il était souvent près de sa maman pour lui rendre service. Il faisait toutes les tâches ménagères’’, confie Mor Sarr.

‘’Bassirou était très proche de notre mère. Parfois quand on s’apprêtait à aller jouer au foot -c’est un bon milieu de terrain- il pouvait se désister à la dernière minute parce que maman avait besoin de lui pour des tâches ménagères. Il pilait le mil, faisait le nettoyage, allait au marché pour notre mère’’, se rappelle Abdoul Aziz Faye.

Issu d’une famille politique

En 2014, le jeune agent des Impôts et Domaines qui jadis vivait dans l’anonymat sort de l’ombre en adhérant au Pastef, parti créé par de jeunes cadres de l’administration. Par la force de ses pertinents arguments, il devient l’une des personnes qui suscitent l’espoir dans son camp. Et le président du parti Pastef dissout, Ousmane Sonko, rayé de la liste des présidentiables, le choisit pour porter le projet des ‘’patriotes’’. La suite on la connaît.

Pourtant, contrairement à ce que beaucoup pensent, la politique n’est pas étrangère chez Diomaye. Son père et son grand-père étaient tous de grands responsables du parti socialiste. ‘’Notre Papa était un grand responsable socialiste. Il était très célèbre dans la commune et notre maison était en quelque sorte le QG du parti. Avant lui, il y avait aussi notre grand-père, Ndiouma Cor, qui en plus d’être un ancien combattant était très proche de Senghor. Ce dernier est d’ailleurs venu ici pour lui rendre visite’’,  fait savoir Abdoul Aziz Faye.

Cet engagement politique du géniteur était à un moment donné à l’origine de la répugnance de la politique chez Bassirou Diomaye Faye. ‘’Pour tout enfant, à un moment de la vie, ton héros c’est ton père. Et si tu n’arrives pas à le voir, ça fait mal. C’est pourquoi on n’aimait pas la politique. Quand on disait qu’on voulait devenir un responsable comme notre père, notre maman nous frappait’’, se rappelle Abdoul Aziz Faye.

Son ami Mor Sarr, rembobine: ‘’Il n’a pas grandi avec le rêve d’être président, parce qu’il n’aimait pas la politique. Peut-être c’est parce que son père était politicien. C’est seulement en 2014 qu’il a pris la décision de se lancer dans la politique. Certains membres de sa famille se sont rapprochés de moi pour que je puisse le dissuader.’’ 

Son grand-frère, Abdoul Aziz Faye se souvient de sa rentrée politique. ‘’Quand il a décidé de faire de la politique, il est venu voir mon père. Ce dernier lui a fait savoir que tout pourrait lui arriver s’il se lançait dans la politique. On était tous réticents. Mais, les raisons, qu’il m’a données, étaient plausibles. Il m’a dit que si on ne fait pas la politique, des gens médiocres vont le faire pour prendre des décisions à notre place’’, se rarappelle-t-il.

Engagement social et piété

Le nouveau président est également décrit comme un homme pieux, un enfant qui a très tôt pris ses distances des mondanités de la vie.  ‘’Quand il est parti à Mbour chez sa tante pour poursuivre ses études, il en a aussi profité pour approfondir ses connaissances de la religion. Diomaye n’a jamais été dans des choses mondaines. Il s’est très tôt privé de ces choses. Et il fait beaucoup de bonnes choses dans la discrétion. Diomaye est un homme très pieux et très engagé dans les causes sociales’’, témoigne Pape Ndiouma Cor Faye.

Dans son fief natal tout le monde témoigne de sa foi à la religion musulmane. ‘’Il est né dans une famille musulmane très pieuse. Ils font partie des gens qui ont érigé en premier une mosquée devant leur maison. Diomaye faisait partie des muezzins’’, informe Ousmane Sène.

Plus jeune Président de la République, Bassirou Diomaye Faye porte désormais l’espoir de tout un peuple, mais également de son village natal, Ndiaganiao.

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