La France poursuit son bras de fer avec l’UE sur son Plan énergie-climat

A gauche le réacteur traditonnel de Flamanville 2. A droite Flamanville 3, le nouveau réacteur EPR. Reportage à la centrale EDF de Flamanville, décembre 2020. Jeremy Suyker / item

 

Avec une dizaine de jours de retard en raison des élections, la France a finalement envoyé à la Commission européenne son Plan national intégré énergie-climat (PNIEC). Une première version avait été déjà été présentée, mais le texte devait être amendé sur recommandations de Bruxelles. En bras de fer avec l’Europe, dans cette nouvelle version, Paris n’en a encore fait qu’à sa tête concernant les énergies renouvelables et le nucléaire.

La France faisait partie des multiples retardataires pour l’envoi de son Plan national intégré énergie-climat (PNIEC). En revanche, dans cette nouvelle mouture après une première version livrée en décembre et retoquée sous les auspices de l’Union européenne, Paris n’a pas touché à son ambition en termes de solaire et d’éolien. La France garde les mêmes objectifs en termes de développement des énergies renouvelablesElle s’était pourtant fait épingler par la Commission européenne en fin d’année dernière, qui lui avait reproché de ne viser que 33% de renouvelables d’ici à 2030, alors qu’une directive a fixé le cap à 44%.

Mais Paris défend une autre logique et élude la question du pourcentage des renouvelables. Elle préfère en brandir un autre : la France prévoit que 58% de sa consommation finale d’énergie soit décarbonée d’ici à 2030. En arguant que l’objectif à poursuivre reste la réduction des émissions de gaz à effet de serre, on se focalise donc sur les énergies dites décarbonées, permettant ainsi d’intégrer le nucléaire dans le calcul. À savoir que la France mène depuis plusieurs années un bras de fer avec Bruxelles faute d’avoir atteint les objectifs fixés en 2009 de compter 23% d’énergies renouvelables dans sa consommation finale d’énergie en 2020

La France prend le risque d’une procédure de sanction

Quant à l’objectif de 2020, il « sera atteint en 2024 et serait même dépassé de près d’un point », se félicite-t-on dans les lignes du PNIEC. « La France dispose d’un bouquet énergétique et électrique parmi les plus décarbonés de l’UE », est-il justifié dans le document. Pour cette raison, le gouvernement avait écrit à la Commission pour justifier son refus d’acheter « a posteriori (des) volumes de production d’énergies renouvelables à d’autres États », comme le prévoit la directive en cas de non-atteinte des objectifs. La France prend ainsi le risque d’une procédure de sanctions par la Commission. Mais, profitant d’un retour en grâce du nucléaire, elle espère aussi rallier des États autour de son action pour remplacer les objectifs de renouvelables par des objectifs de décarbonation.

Quelques modifications ont tout de même été apportées à la demande de Bruxelles, notamment des précisions sur les puits carbone (sols, végétaux, océans… qui absorbent naturellement le gaz carbonique). Les concernant, les objectifs à 2030 ne devraient pas être atteints, même si les projections restent incertaines. Et ce ne sont pas les mesures de renouvellement forestier actuelles qui y pourront grand-chose. Il faudra plus de temps pour en comptabiliser les effets.

Ce plan, que le gouvernement devait remettre à Bruxelles pour le 30 juin, n’est toutefois pas définitif, car il compile trois documents stratégiques devant encore être mis en consultation publique : la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), la troisième Stratégie nationale bas-carbone (SNBC-3) et le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3). Mais le calendrier est désormais suspendu aux tractations politiques post-legislatives