Guicopress
L’État guinéen innove. Exit les appels d’offres rigoureux, les critères de performance, les études d’impact et autres futilités technocratiques? En tout cas désormais, pour construire une route en Guinée, il faut…jurer sur le Livre Saint ! Oui, vous avez bien lu.
C’est dans une atmosphère empreinte de piété et de gravité que le Général Amara Camara, ministre secrétaire général de la Présidence a convié, vendredi, les entreprises nationales Guicopres, Guiter et BGEC à prêter serment. Non pas sur le Code des marchés publics, mais sur la Parole divine. Objectif : garantir que les routes Boké–Gaoual et Kankan–Kissidougou ne s’effondrent pas avant leur inauguration, comme c’est tristement le cas de celle de Kagbelen, gondolée avant même d’avoir été officiellement livrée.
Mais rendons à César ce qui lui appartient : celui qui a réclamé ce serment sacré ne l’a probablement pas fait par folklore. Le Général Camara, que l’on devine sincère dans sa volonté de bien faire, est aussi parfaitement lucide sur l’état de décrépitude morale de certains circuits administratifs. Tellement lucide, d’ailleurs, qu’il ne croit plus à la méthode classique de passation des marchés. Partagé entre l’impératif de résultats concrets et le noble désir de valoriser les entreprises locales, il tente une approche plus…mystique! En somme : puisque la justice, la morale, n’effraient plus personne, autant invoquer la crainte d’Allah. À défaut d’ingénierie robuste, peut-être que l’Enfer suffira à décourager la médiocrité.
Rappelons que ces travaux s’inscrivent dans le très ambitieux – et tout aussi mystique – Programme Simandou 2040, vaste vision nationale qui entend propulser la Guinée vers les sommets du développement par la magie conjuguée des infrastructures, des technologies… et désormais de la foi.
Lors de la première cérémonie, mardi, les contrats avaient été confiés, sans serment, à des entreprises chinoises (Henan Chine, CBTC, CRBC, SDHS), ce qui a le mérite de rappeler que celles-ci restent encore un peu plus crédibles que des entreprises locales dont la seule solidité connue est celle de leurs relations politiques.
Peut-être qu’avec la méthode Gal Amara leur bitume tiendra au delà de la saison des pluies… Et restera jusqu’au… Jugement dernier.
Avec guinee7.com