Le président de la transition, le Général Mamadi Doumbouya, a signé un décret instituant une Direction générale des élections. Placée sous la tutelle du ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), cette nouvelle structure est chargée de l’organisation des processus électoraux dans le pays.
Cette décision suscite d’ores et déjà des réactions au sein de l’opinion publique. Parmi les premières voix à s’exprimer, celle de Maître Mohamed Traoré, ancien membre du Conseil National de la Transition (CNT), qui n’a pas manqué de critiquer la démarche. Selon lui, « il vaut mieux s’abstenir d’organiser des élections coûteuses aux résultats déjà prévisibles », remettant en cause à la fois la transparence et la pertinence d’un tel investissement en cette période de transition.
De la base au sommet, une administration publique totalement politisée et partisane, des administrateurs qui organisent ou participent aux manifestations de soutien à la candidature du Président de la Transition et se comportent comme des militants d’un parti politique, cela pose déjà un véritable problème en terme de sincérité et de crédibilité des prochaines élections.
Si, en plus de cela, c’est une direction placée sous l’autorité du ministre en charge de l’Administration du Territoire, qui aura pour mission d’organiser ces élections, on peut dire que la boucle est en passe d’être totalement et définitivement bouclée. Ce serait simplement la consécration de la règle « juge et partie ».
Pour éviter cette situation, l’avant-projet de constitution prévoyait, parmi les institutions d’appui à la gouvernance démocratique, « un organe technique indépendant en charge de la gestion des élections ». On ne sait pas ce qu’il en est aujourd’hui dans le projet de constitution qui sera soumis au référendum.
Le parlement de transition pensait pouvoir apporter ainsi une réponse à cette question cruciale de l’organisation des élections en Guinée.
En effet, la Guinée n’est pas le Sénégal où les élections sont organisées par le ministre en charge de l’Intérieur sans qu’il n’y ait le moindre doute au sujet de leur sincérité.
À cette allure, il vaudrait mieux faire comme le Mali et le Niger en se passant d’élections qui vont coûter de l’argent pour des résultats connus à l’avance. Il suffirait, pour cela, de réunir des « forces vives de la Nation » qui vont, au terme de « leurs assises », recommander un mandat de 5 à 7 ans renouvelable pour le Président de la Transition. On aurait ainsi fait l’économie d’élections qui, dans tous les cas, aboutiraient immanquablement à un scénario qui se met en place depuis un certain temps déjà.
Par ailleurs, dans le contexte et les conditions actuels, on peut bien se demander quel est le parti politique qui prendrait part à une élection si ce n’est pas dans le but de valider et surtout de légitimer un processus qui a toujours manqué d’inclusion.
Dans tous les cas, ces rappels et observations ne servent plus à grand-chose apparemment. Le train est lancé et rien ne semble pouvoir l’arrêter »
Cette sortie traduit les préoccupations d’une partie de la société civile sur l’indépendance réelle du processus électoral et sur les priorités du moment, dans un contexte où la situation socio-économique demeure fragile.