Canberra, 27/12/2019 (MAP) – Les masques respiratoires sont actuellement en rupture de stock dans certains points de vente dans l’Etat de la Nouvelle-Galles du Sud (sud-est de l’Australie), alors que les habitants se débrouillent tant bien que mal pour se protéger contre une fumée toxique qui envahit plusieurs parties de l’est australien, notamment Sydney, asphyxiée à cause des interminables incendies qui sévissent dans la région depuis des semaines.
On ne distingue plus le fameux opéra de Sydney et son célèbre pont, le Harbour Bridge, qui sont actuellement enveloppés d’une épaisse fumée qui transforme le ciel diurne en orange foncé, tandis que les cendres des feux de brousse s’abattent sur la ville, provoquant une pollution qui était, pendant quelques jours, 11 fois supérieure au niveau estimé dangereux.
Sydney est devenue une chambre toxique à cause de la pollution de l’air, à l’instar de New Delhi, Mumbai, Pékin ou encore, Jakarta. Une situation qui est hautement critiquée par des milliers de médecins australiens. Dans un communiqué conjoint, une vingtaine d’organisations médicales ont appelé à décréter une urgence sanitaire.
Aux urgences, les statistiques montrent une hausse de 48% du nombre de personnes se présentant à l’hôpital avec des problèmes respiratoires, alors que les responsables de la santé de l’État de la Nouvelle-Galles du Sud ont demandé aux personnes souffrant de problèmes respiratoires de rester à l’intérieur autant que possible.
« La ville de Sydney connait depuis novembre une pollution presque quotidienne », a expliqué Brian Oliver, professeur à l’Université technologique de Sydney, faisant savoir que « les particules fines en suspension (PM 2.5 et PM 10) sont néfastes pour la santé. Nous inhalons ces particules qui peuvent voyager sur de longues distances, même d’un pays à l’autre ».
Ce médecin spécialiste a averti que si les feux de brousse ne sont pas maîtrisés rapidement, les niveaux de pollution continueraient d’augmenter. « Selon le jour, la qualité de l’air a été parfois parmi les pires au monde », a-t-il relevé.
Cette alerte à la pollution a provoqué un spectacle qui est devenu étrangement familier pour les habitants de l’est australien, notamment la métropole de Sydney : des gens qui portent des masques respiratoires pour aller au travail.
Ainsi, ces masques sont actuellement en rupture de stock dans certains points de vente dans l’Etat de la Nouvelle-Galles du Sud. Bunnings Warehouse, l’un des plus grands détaillants d’Australie, a indiqué que certains de ses magasins ne disposent plus de masques respiratoires.
« Nous travaillons en étroite collaboration avec les fournisseurs pour fournir plus de masques dans les zones touchées », a déclaré Robyn Hudson, responsable des opérations régionales de Bunnings, dans un communiqué.
Cependant, les experts ont averti que de nombreux produits sont de simples masques de type chirurgical et uniquement conçus pour prévenir des problèmes tels que les allergies au pollen. Ces masques ne bloquent pas les minuscules particules de smog aéroportées, qui peuvent facilement pénétrer le masque et entrer dans les poumons.
« Le masque respiratoire est le moyen le moins utile en tant que réponse de santé publique », a souligné Fay Johnston de l’Institut Menzies pour la recherche médicale à l’Université de Tasmanie.
« Il n’y a qu’un seul type de masques qui aide réellement : les masques P2. Ce sont les seuls qui peuvent filtrer un niveau significatif de pollution de l’air », a expliqué M. Johnston.
Un avis partagé par le professeur de santé mondiale à l’Université nationale australienne (ANU), Sotiris Vardoulakis.
« Les masques de type chirurgical ne sont pas conçus pour la pollution. Ils ne sont pas très efficaces pour éliminer les particules fines en suspension et ne s’adaptent pas parfaitement autour du visage, ce qui laisse beaucoup de fuites », a-t-il indiqué.
Cette ruée vers les masques respiratoires ne semble pas se terminer bientôt. Le ministère de l’environnement de l’Etat de la Nouvelle-Galles du Sud a averti que le niveau de pollution de l’air devrait augmenter à nouveau d’ici la fin de cette semaine, alors que les températures devraient à nouveau augmenter, avec des records attendus à plus de 41°C dans plusieurs villes.
Un état d’alerte alors qui a poussé le Premier ministre climatosceptique Scott Morrison de reconnaitre, dans un fait rare, que le changement climatique est l’un des facteurs à l’origine de la pollution qui affecte le pays.
Le chef du gouvernement australien, qui a essuyé les foudres de l’opinion publique la semaine dernière quand il est apparu qu’il était en vacances à Hawaï en famille, alors qu’au moins 3 millions d’hectares, l’équivalent de la superficie de la Belgique, ont été détruits depuis septembre par les flammes, a toutefois refusé d’admettre que la lutte contre le changement climatique nécessite un virage économique pour son pays, qui assure le tiers des exportations mondiales de charbon, une des sources d’énergie qui rejette le plus de gaz à effet de serre.
Les feux de brousse se produisent chaque année en Australie, mais ils ont été cette saison particulièrement précoces et virulents en raison d’une conjonction de facteurs, notamment des précipitations très faibles, des températures records et des vents forts. D’aucuns estiment que le réchauffement climatique contribue largement à aggraver ces conditions.
-Par Omar Er-rouch-.