Tout un continent avait célébré la victoire de l’un de ses fils, lors de l’élection de Barack Obama à la présidence des États-Unis en 2009. Le premier tome de ses mémoires de chef d’État, « Une terre promise (Fayard), confirme cependant le caractère anecdotique de l’Afrique, dans son univers comme dans son expérience.
Dès le début de son long récit, plus de 800 pages, Barack Obama mentionne son père pour dire qu’il est « absent », mais fait figurer une photo de lui et de ses demi-sœurs dans l’un des encarts photographiques qu’il a lui-même légendés : « Mon père a grandi au Kenya et fait des études d’économie à l’université de Hawaï, où il a rencontré ma mère, puis à Harvard. Après leur divorce, il est retourné vivre en Afrique. » Rien d’autre ne sera dit sur lui.
Quelques lignes sont consacrées à sa première tournée africaine de 17 jours en août 2006, en tant que sénateur et possible candidat à la Maison Blanche. Après avoir visité la cellule de Mandela au Cap et entrevu Desmond Tutu, qui le chahute en lui demandant s’il sera le « premier président africain des États-Unis », il s’envole pour Nairobi. Un « accueil délirant » lui est fait au Kenya, mais il se réjouit de sortir de « toute cette agitation » lors d’une pause en famille avec « les gnous et les lions en pleine savane », lors d’un safari.
Il passe au pas de course en Somalie, en Éthiopie et au Tchad, taraudé par d’autres questions. « À chacune de mes étapes, je voyais des hommes et des femmes œuvrer avec héroïsme, dans des circonstances effroyables. À chacune de mes étapes, on me répétait que l’Amérique aurait pu faire beaucoup plus pour aider à soulager la souffrance de ces populations. Et, à chacune de mes étapes, je me demandais si j’étais candidat à la présidentielle ».
« Fils d’un Africain noir avec un nom musulman »
Aucune mention n’est faite des enjeux africains, malgré l’essor de la menace terroriste sur le continent, lorsqu’il revient sur sa décision de confier les Affaires étrangères à Hillary Clinton. C’est surtout la présence de 180 000 soldats américains en Irak et en Afghanistan qui le préoccupe alors, et l’amorce de leur retrait. Par ailleurs, « en février 2009, c’est l’économie qui m’obsédait, pas la politique », écrit-il, pour cause de crise financière internationale.
Dans les passages sur sa politique étrangère, il cite encore le Kenya, mais pour parler des États-Unis. « Quand j’ai visité le Kenya pour la première fois, les membres de ma famille, dont je faisais la connaissance, m’ont expliqué combien ils admiraient la démocratie américaine et l’état de droit – qui contrastaient, m’ont-ils dit, avec le tribalisme et la corruption qui minaient leur pays ».
Il rappelle aussi, entre les lignes, à quel point la diplomatie américaine reste liée aux enjeux de politique intérieure, en revenant sur les critiques dont il est la cible chez lui. Il se sait perçu par ses détracteurs comme le « fils d’un Africain noir avec un nom musulman et des idées socialistes installé à la Maison Blanche, ce contre quoi ils voulaient être défendus ».
Jacob Zuma « assez avenant »
Dans un chapitre intitulé « Le noble combat », il brosse le tableau de ses relations avec les dirigeants du monde en 2010. Il égratigne Nicolas Sarkozy, mais aussi le président du Brésil Lula, qui lui paraît « peu convaincant ». « Il était, disait-on, aussi scrupuleux qu’un boss new-yorkais de la grande époque des magouilles de Tammany Hall, et des rumeurs circulaient à propos du gouvernement, faisant état de copinage, d’accords de complaisance et de pots-de-vin s’élevant à plusieurs milliards. »
Barack Obama aurait pu en dire autant de Jacob Zuma, qui venait de prendre, en mai 2009, les commandes en Afrique du Sud. Il le trouve alors « assez avenant » et même éloquent, même si « de l’avis général, une large partie de la bonne volonté acquise grâce à la lutte héroïque de Mandela était dilapidée pour cause de corruption et d’incompétence des dirigeants de l’ANC, laissant une proportion significative de la population noire encore embourbée dans la pauvreté et le désespoir ».
Par rfi