[15/08 à 06:54] Sanoh Sekou: Dans le domaine de la protection sociale, de 1883 à date, il n’y a que deux conceptions entre lesquelles les institutions ayant pour mission la gestion d’un régime de sécurité sociale ont la possibilité de fonder leur mode de fonctionnement. Il s’agit de la conception Bismarckienne ou Assurantielle, et celle Beveridgienne ou Assistancielle.
La conception Bismarckienne (assurantielle) est un système corporatiste basé sur la solidarité interprofessionnelle, où les travailleurs ont la possibilité de s’ouvrir les droits grâce à leur activité professionnelle. Son principal mode de financement est les cotisations sociales, et il est obligatoire pour tous les salariés.
Quant à celle Beveridgienne (assistancielle), elle est universaliste et couvre toute la population en accordant les mêmes droits à tous. Elle est financée par les impôts.
En République de Guinée, les deux institutions de sécurité sociale créées par l’état sont : la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) créée en 1960 qui gère les travailleurs du secteur privé et assimilés, et la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale des Agents de l’Etat (CNPSAE) créée en 2014, devenue Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS) en mai dernier, qui gère les agents de l’Etat suite à un protocole d’accord entre le gouvernement guinéen et les syndicalistes.
Ledit protocole d’accord signé en 2012 qui a abouti à la création de cette institution (CNPS) en 2014 a pour but de répondre à un besoin primordial des fonctionnaires, qui depuis toujours à part la retraite, n’ont aucune autre prestation de sécurité sociale comme par exemple: les soins de santé, les indemnités de maladie, les risques professionnels, les prestations familiales…
Cette absence de protection sociale pour les fonctionnaires a été source de plusieurs contrariétés , car avec leur revenu, il ne leur est pas facile de se prendre en charge en cas de maladie (surtout grave), ou de prendre en charge leurs ayants droit (conjoint.e enfants) qui sont malades. Également, quand ils sont victimes d’accidents de travail, il n’existe pas d’institution chargée de leur garantir des prestations liées à leurs besoins.
C’est pourquoi, la CNPS a été créée afin de répondre à ces manquements. Comme à l’image de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, cet établissement public gère quatre branches de prestations à savoir:
La vieillesse
Les Risques professionnels
Les Prestations familiales
L’assurance maladie
Pour avoir droit à ces prestations, comme dans tout système contributif de protection sociale, les agents de l’État et leur employeur (l’Etat) doivent cotiser à la CNPS pour couvrir les charges desdites prestations à hauteur de:
5% du salaire indiciaire des fonctionnaires,
5% du salaire de base pour les contractuels permanents de l’Etat,
2% pour les pensionnés.
Quant à l’État employeur, il lui reviendra de payer 18% de ces mêmes salaires qui constituent l’assiette.
Connaissant ce à quoi correspondent les 5% qui seront prélevés sur les salaires des fonctionnaires et les avantages liés aux prestations sociales garanties par la CNPS, il n’est pas difficile de comprendre ce qui est plus avantageux pour les agents de l’Etat.
Quand bien même la forme de procéder est d’une importance capitale !
Toutefois, depuis la création de la CNPS en 2014, il a fallu août 2021 pour qu’il y ait le prélèvement des 5% sur les salaires des fonctionnaires et 2% sur les pensions. C’est à cette date que les agents de l’Etat et les retraités ont commencé à payer leur part sociale pour le financement de leur couverture sociale, comme à l’image des fonctionnaires des autres pays.
Ne connaissant pas les avantages liés à ce prélèvement par manque de communication à cet effet, et voyant leur revenu diminuer, les fonctionnaires n’étaient pas enchantés de cet acte surtout avec la méfiance qui a toujours existé entre la population et les institutions étatiques.
C’est pourquoi, dès l’arrivée du Colonel Mamadi DOUMBOUYA au pouvoir, il a procédé par un décret présidentiel pour abroger la décision relative à ce prélèvement.
Et pourtant, dans tout système assurantiel basé sur la solidarité socioprofessionnelle, l’employeur et son employé doivent tous cotiser, d’où la notion de la part patronale et celle ouvrière.
Mais à date, pour le fonctionnement de la CNPS, c’est seulement l’Etat employeur qui paye sa part de cotisation. L’employé quant à lui ne paye pas. Et cela n’est pas à l’avantage des fonctionnaires car ils ne peuvent pas bénéficier des autres prestations de cette institution notamment l’assurance maladie et les risques professionnels.
Cela crée également assez de manque à gagner pour l’institution et ça constitue un frein dans l’atteinte de ses objectifs.
C’est la raison pour laquelle, il est important que l’Etat revienne sur la décision relative au prélèvement des 5%, pour que les fonctionnaires contribuent au régime, afin de prétendre bénéficier des prestations sociales à l’image des travailleurs du secteur privé assujettis à la CNSS.
Après tout, comme les fonctionnaires finiront un jour par contribuer au financement de leur sécurité sociale conformément aux exigences des principes en la matière, le mieux serait de le commencer dès maintenant, et de prendre toutes les dispositions nécessaires aux respects de leurs droits en tant qu’assurés sociaux.
Bhoye Goumba